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Vous vous posez des questions
pour ré-concilier maladie et travail ?

L’adaptation du poste de travail pour mieux concilier maladie et travail


En 2025, 25 % des actifs seront concernés par une maladie chronique [1]. Certaines maladies sont invalidantes, sur le plus ou moins long terme, voire à vie. Difficile alors de ne pas prendre en considération leur impact sur la vie professionnelle. De nombreuses adaptations de poste sont possibles, quel que soit le type de poste occupé.


Cela dépend des difficultés rencontrées par le salarié et de la situation de travail.

Il peut s’agir d’adaptations matérielles, d’aménagements du temps de travail, d’adaptation des tâches ou des moyens de communication. Cela peut demander une aide technique, humaine ou organisationnelle. L’adaptation matérielle du poste de travail peut prendre de multiples formes (siège et clavier ergonomiques, bureau assis-debout, écran supplémentaire, télétravail, outils et éclairage adaptés, dispositifs d’isolation du bruit ou des UV, logiciels spécifiques, aménagements d’un véhicule…). Pour ce qui relève de l’aménagement du temps de travail, les horaires libres ou aménagés peuvent permettre une adéquation entre l’activité de travail [2] et l’état de santé du salarié.


Ces aménagements peuvent nécessiter une étude de poste et être suggérés par un ergonome. Les organismes de santé au travail peuvent accompagner les entreprises dans l’adaptation des postes, en fonction de leurs problématiques et des besoins des salariés concernés. Ils peuvent être pris en charge en partie par des organismes comme l’Agefiph, le Fiphfp, les associations Handiem et OETH, l’APAS-BTP ou le FASTT, en fonction du secteur d’activité de l’entreprise. En savoir plus

Ils peuvent être temporaires, par exemple pour faciliter la réinsertion professionnelle d’un salarié malade ou victime d’un accident, ou s’inscrire dans la durée.


Pour Krystele :

« L’adaptation d’un poste, c’est tout simplement l’équité à laquelle une personne handicapée a le droit pour pouvoir exprimer son plein potentiel. »

Après une grosse scoliose, Krystele a gardé des séquelles. Cela se manifeste principalement par des douleurs chroniques invalidantes qui impactent son quotidien, notamment au travail. Pour continuer à travailler son poste a été adapté. Elle a pu être accompagnée et soutenue par le service des ressources humaines de son entreprise et un ergonome. Elle nous partage aujourd’hui son expérience.


Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre expérience de vie de la maladie en quelques mots ?

Atteinte d’une grosse scoliose en partie opérée il y a vingt ans (via une arthrodèse), je souffre de douleurs chroniques invalidantes. Le maintien de ma qualité de vie passe par une hygiène de vie constante et des soins médicaux pluridisciplinaires hebdomadaires, complétés par le sport. Il m’aura fallu entre dix et quinze ans pour constater l’aggravation progressive de mon état de santé, engendrant petit à petit l’installation de la fatigue chronique.


En 2020, j’ai atteint le point de rupture, le crash : les douleurs ont décompensé jusqu’à un niveau insupportable.

C’est un passage très délicat lorsqu’on réalise que tout le système que l’on a mis en place dans sa vie s’effondre complètement.

Comment conciliez-vous votre maladie et votre travail ?


Cette conciliation est d’abord passée par l’arrêt maladie puis le temps partiel thérapeutique. Aujourd’hui, trois éléments permettent mon maintien à mon poste : l’adaptation complète de mes horaires (je suis au forfait jour), la possibilité de télétravail (8 jours par mois), et l’adaptation ergonomique de mon poste de travail en présentiel. J’ai également des points de vigilance par rapport aux missions qui me sont plus difficiles physiquement ou aux horaires (notamment pour conserver ma médication à heure fixe, via certaines molécules incompatibles avec la conduite).

Ces adaptations sont vraiment cruciales car, pour être honnête, en tant que malade chronique, on a souvent l’impression de travailler autour de nos obligations médicales et non l’inverse. Difficile de penser autrement quand on passe d’un rendez-vous médical à une réunion en visio puis à un examen à l’hôpital…


Quelles difficultés avez-vous rencontrées ? Qu'est-ce qui vous a aidée ?


Je dirais que le plus dur, au-delà des aspects moral et physique déjà difficiles, ce sont les obstacles administratifs auxquels on se heurte. Dans ce contexte, nous sommes tributaires des organismes et des aides, chacun ayant ses propres délais, ses propres process et ses propres codes. On rentre dans un univers quelque peu ubuesque, d’une lenteur fastidieuse. Il faut s’armer de patience, ce qui est difficile quand on se trouve dans une situation qui nous accule déjà de toutes parts.

Sur ce point, ce qui m’a énormément aidée, c’est le travail et le soutien de mon service ressources humaines, indéniablement !


J’ai fait une demande de RQTH, conseillée et orientée par mon médecin traitant, sachant qu’on m’avait déjà conseillé de faire la demande une dizaine d’années auparavant, j’avais 23 ans. À ce moment-là, je n’avais pas besoin d’adaptation dans mon quotidien donc je ne voyais pas l’intérêt de faire cette demande. Cela m’était resté en tête, je savais qu’un jour, je serais sûrement amenée à la faire. Quand mon état de santé s’est aggravé, ma responsable RH m’en a parlé en me montrant les avantages : comment cela pourrait m’aider au quotidien, quels bénéfices cela pourrait m’apporter.


Dans quel contexte avez-vous fait appel à un ergonome pour adapter votre poste de travail ?


C’était un travail conjoint et rondement mené entre les RH et moi-même, étant toujours restée aussi proactive que je le pouvais, dans le quota d’énergie qui m’était imparti. Après une première étude de poste succincte par un ergonome de la médecine du travail, une autre étude plus complète a été menée (suite à l’obtention de ma RQTH effective) par un ergonome privé dont le contact nous avait été transmis par Cap emploi. Tout le monde a travaillé de concert pour faire avancer le dossier et favoriser la demande de financement à l’Agefiph. Ce parcours a duré une année complète, des premiers rendez-vous à l’installation de tout le matériel sur site.

L’adaptation de poste a été financée à 70 % par l’Agefiph. J’ai bénéficié d’un bureau à commande électrique pour pouvoir travailler debout et assise, d’un siège adapté et d’un repose-pieds que l’on a aussi complété par une sorte de tapis en plastique facilitant le roulement du siège sur la moquette. Les roulettes du siège étaient déjà adaptées à la moquette mais ce n’était pas suffisant.

En dehors des adaptations du poste de travail matériel, je bénéficie aussi du forfait jour, ce qui me permet, avec la bienveillance et la tolérance de mes managers, d’organiser mon planning de travail autour de mon planning médical. Cela permet de faciliter les rendez-vous et les suivis médicaux, de ne jamais être en rupture de soins. J’ai des horaires atypiques par rapport à certains collègues, mais je reste en forfait jour comme la majorité de mes collègues, donc je n’ai pas d’avenant ou d’adaptation spécifique. Je bénéficie également du télétravail, sans avenant spécifique. Il y a un accord d’entreprise depuis deux ans qui prévoit 8 jours de télétravail par mois optionnels, sur demande. Dans mon cas, cela correspond également aux prérogatives de la médecine du travail, j’utilise de fait mes 8 jours tous les mois de l’année. Je sais que si j’avais des difficultés et que ces 8 jours n’étaient pas suffisants, je pourrais bénéficier en complément d’un avenant avec mes ressources humaines et je pourrais augmenter ce quota.

Par ailleurs, je mets régulièrement en place des systèmes d’adaptation spécifiques, avec la tolérance et la bienveillance de mon équipe (collègues et managers) lors des événements ponctuels. Par exemple, lors d’un événement professionnel particulièrement long, que ma condition physique ne me permet plus de réaliser dans les mêmes conditions que les autres salariés, pendant lequel je peux avoir besoin de m’allonger régulièrement je mets en place un aménagement atypique (cf. photo). Encore une fois, preuve du fait que beaucoup de choses sont faisables si on est prêt à ouvrir notre esprit à d'autres manières de travailler, respectant l'unicité de chacun•e et la complémentarité des salarié•e•s au sein d'une équipe.

En dehors de l'adaptation de votre poste du travail ? De quoi auriez-vous eu ou auriez-vous besoin ?


Ce qui m’a manqué au début, même avec le soutien de mes proches et de mes collègues, c’est l’échange avec des personnes se trouvant dans une situation physique et administrative similaires à la mienne. On est perdus : la RQTH, la MDPH, la CPAM, le dossier d’invalidité, les IJSS, Cap emploi… On se retrouve dans un parcours complexe et l’isolement peut vite prendre le dessus, avec deux deuils à faire : celui de sa vie d’avant et celui de la vie que l’on aurait souhaitée à l’avenir. Or, le moral est primordial pour être encore plus proactif dans ses soins et retrouver un équilibre de vie. Ce qui m’a manqué, je suis allée le chercher, via les réseaux sociaux notamment. Et toutes les ressources que j’ai pu y trouver, portées par des personnes engagées et des communautés bienveillantes, m’ont vraiment aidée à rester positive pendant tout ce parcours.

Quels sont vos projets aujourd'hui ?


Je n’ai pas vraiment de projet à l’heure actuelle, je continue de chercher mon équilibre entre vie professionnelle et personnelle. La maladie fait que nous avançons toujours sur un fil, dans une mécanique que le moindre grain de sable peut faire dérailler, à tout moment. J’ai par contre envie de continuer à exercer le métier que j’aime, et travailler également sur ma vision du travail : intégrer que la productivité d’une personne n’est pas intrinsèquement reliée à sa valeur. Finalement, cela signifie sortir de la logique validiste sous-tendue dans notre société.

Selon vous, comment peut-on améliorer l’accompagnement des personnes malades en entreprise ?

Dans un premier temps réduire les délais d’attente au niveau de la MDPH. Jusqu’à un an d’attente pour un dossier dans certaines régions, c’est beaucoup trop et cela prouve qu’il y a un réel dysfonctionnement. En un an, le ou la salarié•e a largement le temps d’être licencié•e pour inaptitude car le poste n’est pas adapté, de subir des pressions diverses et variées de la part de sa hiérarchie (ce qui est une réalité dans de nombreux parcours !) En bref, de se retrouver dans une situation matérielle invivable, en plus de se battre pour sa santé.

D’une façon plus générale : aider à changer la vision du handicap en entreprise afin que les personnes qui sont encore en mesure de travailler puissent réellement avoir leur place et soient considérées dans leur entièreté, c’est-à-dire à la fois avec leurs besoins spécifiques mais aussi et surtout avec leurs compétences.


Si vous aviez 1 seul conseil ou bonne pratique à partager avec une personne qui souhaiterait adapter son poste de travail ?

Quand on bénéficie d’aides pour adapter son poste de travail, on est souvent pris de culpabilité, on craint de bénéficier d’un traitement de faveur (ce qui est un comble lorsque l’on connaît notre quotidien !) on a peur du jugement, de ne pas mériter ces aides et ce soutien… Pour éviter d’être envahi•e par ces pensées intrusives, je conseillerais à toute personne bénéficiant de ce parcours de se rappeler la différence entre égalité et équité. L’adaptation d’un poste, c’est tout simplement l’équité à laquelle une personne handicapée a le droit pour pouvoir exprimer son plein potentiel. En cela, cette adaptation n’est pas une faveur : elle est à la fois une chance et j’irais presque jusqu’à dire un droit : la compensation naturelle de tous les autres obstacles qui se sont dressés devant elle jusque-là.


Il s’agit d’une photo au travail pendant un évènement (journée de travail de 10h/12h environ). Ce jour-là, les équipes en place se sont totalement adaptées à ma condition et m'ont épaulée pour que je puisse travailler allongée ou en faisant des étirements sur un lit de fortune que j'avais concocté dans mon bureau. Dès lors que j'avais repris de l'énergie, je pouvais alors rejoindre les équipes sur site puis revenir à mon lit quand le besoin s'en faisait sentir.



Merci Krystele pour votre témoignage.


Vous êtes patient ? aidant ? manager ? professionnel des ressources humaines ? Vous aussi vous souhaitez témoigner de votre expérience de la maladie au travail, contactez-nous à l’adresse alloalex@wecareatwork.com.

Pour toutes vos questions, sachez qu’ALLO Alex est là pour vous aider ! Pour rappel, le service est joignable au 0800 400 310 du lundi au vendredi de 9h à 17h (appel gratuit).



 

[1] « Les maladies chroniques sont, pour le travail, un enjeu majeur. Selon l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT), ces pathologies affectent 15 % de la population active. Elles pourraient concerner 25 % de la population active d’ici à 2025 » – CHASSANG Michel et GAUTIER Anne, Les avis du CESE – Les maladies chroniques, Paris, juin 2019, CESE 14, p.32


[2] L’activité de travail ou travail réel correspond au travail effectif, « au processus de réalisation » dans son ensemble pour réaliser un objectif fixé : ce qui a été mis en œuvre, les outils et ressources utilisés (humaines ou matérielles) et son résultat, ainsi qu’ « a fortiori l’activité mentale nécessaire pour les obtenir ».

Sources : Tourmen, C. (2007). « Activité, tâche, poste, métier, profession : quelques pistes de clarification et de réflexion » Santé Publique, 19, 15-20. [consulté le 15 février 2023]

anact.fr : Fiche outil « Comprendre et questionner l’activité de travail », Anact-Aract, [consulté le 15 février 2023]


Crédit photo : 1/ Rose Fushia Photographie, 2/ Laurent Garcia et Rémi Benoît


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